Caligula (37-41) et Claude (41-54)

Caligula (37)

Tibère avait désigné deux héritiers : le fils de Drusus, nommé Tibérius Gemellus; et le dernier des enfants de Germanicus, Caïus, surnommé Caligula. Celui-ci, aimé des soldats, n’eut pas de peine à faire casser ce testament par le sénat, et prit tous les pouvoirs.

Après Tibère, tout prince eût paru bon. Caligula sembla excellent. Il délivra les prisonniers, rappela les bannis, défendit les accusations de lèse-majesté, rechercha par tous les moyens l’amour du peuple et l’estime du sénat. Mais dans le huitième mois de son règne, il tomba malade. Rome entière fit des voeux publics pour sa guérison : malheureusement le ciel parut les exaucer, et Caïus vécut pour devenir l’horreur du genre humain.

Ses fureurs (37-41)

Cette maladie sembla avoir altéré sa raison. Ce ne fut plus un empereur, mais un fou furieux, en guerre avec les dieux qu’il insultait, avec la noblesse de Rome qu’il décima, avec les provinces qu’il épuisa par ses exactions. En moins de deux ans il dépensa l’épargne de Tibère; pour remplir son trésor, ou, comme il disait, pour apurer ses comptes, il prenait la fortune des citoyens riches, le plus souvent avec leur vie. Un jour, en Gaule, il jouait aux dés et perdait; il se fait apporter les registres de la province et marque pour la mort les citoyens les plus imposés : « Vous jouez pour quelques misérables drachmes », dit-il à ses courtisans, « moi, je viens d’un coup d’en gagner 150 millions. » Il faisait argent de tout. A Lyon, il vendit lui-même aux enchères les meubles du palais impérial et des objets que ses aïeux avaient ou aimés ou portés.

Ce fou fit deux expéditions, l’une contre les Germains, l’autre contre les Bretons. Dans la première il fit cacher au-delà du Rhin quelques soldats de sa garde germaine, et alla ensuite les faire prisonniers. Dans l’autre, arrivé au bord de l’Océan il fait sonner la charge, puis commande à ses soldats étonnés de ramasser les coquillages épars sur la rive.

L’assassinat de Caligula (41)

Le monde supporta quatre ans les fureurs de Caligula. « Combien je souhaiterais », disait ce monstre, « que le peuple romain n’eût qu’une seule tête pour l’abattre d’un seul coup! ». Le sénat se lassa de lui fournir des victimes, et un tribun des prétoriens, Chéréas, l’égorgea.

Avènement de Claude (41)

L’occasion semblait favorable pour rétablir la république : mais ce n’était le compte ni du peuple ni des soldats. Quelques prétoriens trouvent dans un coin du palais, où il se tenait blotti, le dernier des princes de la maison impériale. C’était Claude, oncle de Caligula et petit-fils de Livie par son père Drusus. « Sois notre empereur, » s’écrient les soldats. Lui, éperdu, tremblant, se laisse emporter au camp. Là il reprend un peu de courage, promet aux troupes de l’argent: les sénateurs se voient peu à peu abandonnés et courent eux-mêmes au-devant du nouveau maître (41).

Ses affranchis; conspirations (41-54)

Claude, dans ses moments lucides, avait de bonnes intentions. Son gouvernement s’annonça par quelques mesures libérales. Il flétrit la mémoire de Caligula, et montra de l’assiduité à rendre la justice. Il aimait à juger et souvent il jugeait bien. Mais sa tenue sans dignité, sa tête branlante, son bégayement et parfois des sentences ridicules le déconsidéraient.

Sa faiblesse (41-54)

D’ailleurs Claude, faible et débonnaire jusqu’à l’imbécillité, se laissa toute sa vie dominer par son entourage. Son règne fut celui des affranchis, d’un Pallas, d’un Narcisse, sans compter l’impératrice Messaline, dont le nom seul est un opprobre. Neuf ou dix complots furent formés contre la vie de Claude. Trente-cinq sénateurs et trois cents chevaliers périrent. Les plus illustres furent Silanus, Valérius Asiaticus, et Paelus, dont la femme Arria montra un stoïque courage. Comme il hésitait à se tuer, elle se frappa d’abord, et, lui tendant le poignard : « Tiens, Paelus », dit-elle, « cela ne fait pas de mal. »

Guerre au dehors; conquête de la Bretagne (43)

Au dehors d’habiles généraux soutenaient l’empire. Tandis qu’au-delà du Rhin Galba et Corbulon forçaient les Germains à rendre la dernière des aigles de Varus, Suétonius Paulinus s’avançait, en Afrique, jusqu’au mont Atlas, et Plautius, secondé par Vespasien, soumettait la Bretagne (43). Le chef d’une des tribus bretonnes, Caractatus entra dans Rome chargé de chaînes. « Hélas ! » dit-il, à la vue des splendeurs de la grande ville, « comment ceux qui possèdent tant de richesses peuvent-ils nous envier nos pauvres cabanes? »

Les scandaleux débordements de Messaline obligèrent Claude à signer son arrêt de mort. Il épousa ensuite Agrippine. Cette femme ambitieuse avait déjà un fils, Néron. Pour le faire empereur, elle osa tout : Claude empoisonné, et son fils Britannicus écarté, les prétoriens saluèrent Néron du titre d’imperator (54).