Agésilas (398-361 av. J.C.)

Cause d’une nouvelle guerre entre Sparte et la Perse (396 av. J.C.)

Pendant que les Dix mille achevaient cette retraite mémorable, le satrape Tissapherne arrivait dans son gouvernement d’Asie Mineure. Il y persécuta les habitants des villes grecques qui avaient soutenu Cyrus. Sparte prit en main leur cause et envoya à leur secours plusieurs généraux. Le plus redoutable fut un de ses rois, Agésilas.

Agésilas (399-396 av. J.C.)

Agésilas appartenait à l’une des deux familles royales de Sparte. Il était laid, petit et boiteux. Mais dans ce corps disgracié de la nature, il sut placer de rares qualités qui lui attirèrent le respect. Il fut d’une grande sobriété, ce qui le fit vivre plus de 80 ans. Les satrapes d’Asie, le roi égyptien Tachos le virent avec étonnement partager la grossière nourriture de ses soldats, assis sur la terre nue, la tête découverte sous un soleil brûlant. Je ne parle pas de son courage, c’était celui de tous les Spartiates. Mais il y joignait une habileté et une prudence consommées. On le verra sauver Lacédémone du plus grand péril qu’elle eût jamais couru. Ce n’est pas cependant un grand homme, et l’histoire doit lui reprocher une morale politique peu sévère.

Il n’avait pas droit au titre de roi, car son frère Agis, en mourant, avait laissé un fils. Mais Lysandre, le vainqueur d’Egos-Potamos, dont l’influence baissait en Grèce, eut assez de crédit à Lacédémone pour faire écarter le fils d’Agis et proclamer à sa place Agésilas (399 av. J.C.). Il comptait régner sous le nom de son protégé. Mais il se trouva qu’Agésilas était un homme supérieur qui, à la première occasion, rejeta bien loin cette tutelle.

Expédition d’Agésilas en Asie (396 av. J.C.)

En 396 av. J.C., il obtint le commandement de l’armée d’Asie. Il partit d’Aulis, comme jadis Agamemnon, vainquit Tissapherne sous les murs de Sardes, et rêvait déjà de renverser le trône du grand roi. A la tête de 20000 Grecs, il s’enfonça audacieusement vers la haute Asie; la Perse tremblait; l’expédition d’Alexandre allait être avancée de soixante ans. Mais le grand roi fut sauvé par son or; il soudoya en Grèce une prise d’armes contre Lacédémone.

Puissance et excès de Sparte; ligue contre elle (396-394 av. J.C.)

Sparte avait durement usé de sa victoire sur Athènes. Ses harmostes ou conciliateurs s’étaient établis dans toutes les villes grecques, et y exerçaient une dictature odieuse. Dans beaucoup de cités, le sang avait coulé, et chaque année elle levait un tribut de 1000 talents, plus lourd que celui qu’on avait payé aux Athéniens. Aussi beaucoup de haine s’amassait contre elle. Quand les Perses, attaqués en Asie par les Lacédémoniens, virent naître ce mécontentement, ils espérèrent le changer en guerre ouverte, et un de leurs agents vint en Grèce avec 50 talents. Thèbes se mit à la tête de la ligue où entrèrent Athènes, Corinthe et Argos. En 394 av. J.C., les alliés gagnèrent la bataille d’Haliarte. Lysandre, l’instigateur de cette tyrannie, y fut tué. Le péril parut assez grand à Sparte pour qu’elle rappelât aussitôt Agésilas. Il renonça en frémissant à sa fortune.

Rappel d’Agésilas (394 av. J.C.)

« Ce sont 30000 archers qui me chassent de l’Asie », disait Agésilas en faisant allusion à l’empreinte marquée sur les 30000 pièces d’or persiques qu’avaient reçues les orateurs de Thèbes, de Corinthe et d’Argos qui venaient d’exciter la guerre. Il traversa la Thrace, la Macédoine, se faisant jour à la pointe de la lance. Les Thessaliens, qui voulurent l’arrêter, furent battus, et il pénétra sans obstacle jusqu’à Coronée. Les alliés l’y attendaient. ll y eut là un choc furieux. Les Thébains montrèrent des qualités militaires qui étaient de mauvais augure pour Sparte. Agésilas lui-même fut couvert de blessures, cependant le champ de bataille lui resta (15 aôut 394 av. J.C.); il défit les alliés.

Traité d’Antalcidas (387 av. J.C.)

La victoire de Coronée raffermit la domination de Sparte sur terre. Mais Conon, amiral des flottes athénienne et persique, lui enlevait au même moment l’empire de la mer. Lacédémone, effrayée, traita avec le grand roi, qui vit à sa cour les descendants des vainqueurs de Platées accepter les conditions qu’il voulait bien leur faire (traité d’Antalcidas 387 av. J.C.).

Décadence du patriotisme (387-382 av. J.C.)

Ce n’est pas que la Perse eût plus de force alors qu’au temps de Xerxès, mais la Grèce avait moins de vertu. Tout s’y vendait. Et comme le grand roi avait beaucoup d’or, il pouvait acheter beaucoup: les orateurs, les soldats, les flottes, les cités. La fortune d’une guerre ne dépendait plus du patriotisme des citoyens et du talent des chefs, mais d’une obole en plus ou en moins sur la solde qui faisait passer ces soldats mercenaires d’un camp dans l’autre.