L’Egypte

Limites de l’Egypte

L’Egypte est une vallée de 880 kilomètres de longueur, resserrée au Sud entre deux chaînes de montagnes granitiques qui ne laissent parfois que quelques centaines de mètres entre leur pied et le bord du fleuve, mais qui s’écartent et finissent par disparaître en avançant vers le Nord.

De ce côté, l’Egypte est bornée par la Méditerranée; au Sud, ses limites étaient peu certaines. Ce ne fut sans doute qu’après de longues guerres entre les rois d’Egypte et d’Ethiopie, que la frontière fut décidément fixée aux cataractes de Syène. A cet endroit, des rochers embarrassent le lit du fleuve et marquent comme une limite à la navigation.

Le désert

A droite et à gauche de cette longue vallée s’étendent d’arides solitudes, couvertes de sables mobiles que la tempête agite comme une mer. Sur cet océan du désert, il y a aussi des naufrages. Soulevés par le vent et amoncelés par lui contre les obstacles qu’ils rencontrent, les sables ont souvent englouti des caravanes entières. Ils menacent perpétuellement l’existence de l’Egypte.

Le Nil et le Delta

L’Egypte, dit Hérodote, est un don du Nil. Il semble, en effet, que la mer ait pénétré autrefois assez avant dans cette longue vallée. Mais le Nil, apportant avec ses eaux un épais limon, exhaussa le sol sur lequel il le déposait, de sorte que ses alluvions comblèrent peu à peu le golfe que la Méditerranée formait à la place du Delta actuel. On nomme ainsi la partie inférieure de l’Egypte qui, fermée au Nord par la mer, et enveloppée à l’Est et à l’Ouest par deux bras du fleuve, présente la forme de la lettre grecque, appelée Delta, ou, si l’on aime mieux, celle d’un triangle, dont la Méditerranée serait la base, et le point où le Nil se bifurque, le sommet.

Inondations périodiques du Nil

Chaque année, presque à jour fixe, du 20 juin au 1er juillet, ce fleuve grossit peu à peu durant cent jours, franchit ses rives dans la moyenne Egypte et dans le Delta, et se répand sur le pays, jusqu’à la fin de septembre, imbibant les terres d’une quantité d’eau, qui, avec les rosées abondantes des nuits, suffit pour nourrir les plantes le reste de l’année.

A partir du commencement d’octobre, il baisse, se retire et rentre enfin, au solstice d’hiver, dans son lit, laissant sur les terres qu’il a recouvertes un limon gras et léger, qui sert d’engrais. Il continue à décroître jusqu’à la fin de mai.

Il faut que la crue soit de sept mètres à sept mètres et demi pour que l’inondation recouvre tout le sol labourable et que la récolte soit abondante. S’il monte moins haut, une partie seulement des terres est arrosée et peut-être ensemencée. Au-dessus de huit mètres, la crue devient nuisible, parce que les eaux séjournent trop longtemps sur les terres; passé huit mètres et demi la famine est certaine, car on ne peut faire les semailles dans un sol marécageux, et il y a danger de peste.

Dans la haute Egypte, le fleuve étant encaissé entre des rives élevées, l’inondation est artificielle. On a calculé que l’exhaussement du sol de l’Egypte, dû aux dépôts du Nil, était de 0,126 millimètres par siècle.

Ce phénomène, qui semblait jadis merveilleux et inexplicable, est fort simple et non particulier au Nil. Tous les fleuves dont les sources sont dans la zone torride ont aussi des crues régulières dues aux pluies périodiques qui tombent dans cette région.

Les cataractes de Syène

A son entrée en Egypte, le Nil passe au travers de rochers qui, dans les basses eaux, montrent leur crête au-dessus de la surface du fleuve et produisent les cataractes de Syène, si célèbres dans l’antiquité. Ces rochers à fleur d’eau ne sont pourtant pas bien terribles; ils gênent la navigation en produisant des rapides, mais ne l’interceptent pas.

Les bouches du Nil

Depuis Syène jusqu’à Memphis, le Nil coule dans un seul lit. A la pointe du Delta, il se sépare et va se jeter dans la mer par sept embouchures qu’on nommait : Canopique, Bolbitine, Sébennitique, Phatmitique, Mendésienne, Tanitique et Pélusienne. Les seules branches qui versent aujourd’hui leurs eaux à la mer sont celles de Rosette et de Damiette; les autres ne sont plus que des canaux.

Aspects divers de l’Egypte

Les champs du Delta offrent trois tableaux différents, selon les trois saisons de l’année égyptienne. Dès le milieu du printemps, les récoltes déjà enlevées ne laissent voir aucune terre grise et poudreuse, si profondément crevassée qu’on ose à peine la parcourir1. A l’équinoxe d’automne, c’est une immense nappe d’eau rouge et saumâtre, du sein de laquelle sortent des palmiers, des villages et des digues étroites qui servent de communications. Après la retraite des eaux, on n’aperçoit plus, jusqu’à la fin de la saison, qu’un sol noir et fangeux. C’est pendant l’hiver que la nature déploie toute sa magnificence; alors la fraîcheur, la force de la végétation nouvelle, l’abondance des productions qui couvrent la terre surpassent tout ce que l’on admire dans les pays les plus vantés. Durant cette heureuse saison, l’Egypte n’est, d’un bout à l’autre, qu’une magnifique prairie, un champ de fleurs ou un océan d’épis; fertilité que relève le contraste de l’aridité absolue qui l’environne.

« …Sous ce climat heureux, où l’eau n’est jamais glacée, où la neige est un objet inconnu, où les arbres ne quittent leurs feuilles que pour en produire de nouvelles, la végétation n’est jamais suspendue; et le laboureur comblé dans ses voeux ne compterait qu’une saison constamment productive, si les circonstances du débordement du Nil ne limitaient la culture à une partie de l’année. Aussi, quand les travaux des hommes suppléent aux inondations, la terre peut donner jusqu’à deux ou trois récoltes dans un an. »

1. Il pleut rarement en Egypte. Mais par les plantations d’arbres, l’extension des cultures, les nouvelles surfaces d’eau du canal de Suez et des lacs Amers, la météorologie du pays paraît se modifier.