Les premiers rois, Sésostris

Ménès (3150 av. J.C.?)

L’histoire primitive de l’Egypte nous est à peu près inconnue. Les prêtres contèrent à l’historien grec Hérodote que les dieux avaient d’abord gouverné l’Egypte pendant une longue suite d’années. Ils voulaient dire que la caste sacerdotale avait été d’abord la seule maîtresse du pays. Au bout de quelques générations, les guerriers obligèrent les prêtres à partager avec eux le pouvoir. Ménès (Narmer), leur chef, fut le premier des rois ou pharaons égyptiens. Il jeta les fondements de Memphis, environ 3150 ou 5000 ans avant notre ère.

Les Hycsos (Hyksôs) (2214-1703 ou 2040 ou 1650 av. J.C.?)

L’Egypte comptait déjà au bord du Nil une longue existence et quatorze dynasties de rois dont la XIIième (3000 ou 2040 ou 1800-1720 av. J.C.) avait vu l’apogée de l’art et de la civilisation, lorsque des nomades d’Asie, connus sous le nom d’Hycsos (Hyksôs), firent la conquête du Delta et de la moyenne Egypte (2214 av. J.C.) (autres sources : entre -1674 et -1548). Leurs rois se fixèrent à Memphis. Ils fortifièrent l’entrée du Delta, du côté du désert d’Arabie, et défendirent par une garnison de 240000 hommes la place d’Avaris (Péluse) pour empêcher que d’autres nomades ne suivissent leurs traces. Ces étrangers arrêtèrent le développement de la civilisation égyptienne quoiqu’ils n’eussent pas fait aux Egyptiens et à leurs monuments la guerre d’extermination dont on les accuse. Il paraît que ce fut un de ces rois qui prit Joseph pour ministre.

Expulsions des étrangers (1700 av. J.C.)

Les Hycsos dominèrent pendant plus de cinq siècles dans la moyenne et dans la basse Egypte. Les pharaons indigènes s’étant réfugiés dans l’Egypte méridionale qu’on appelle Thébaïde à cause de la grande ville de Thèbes qui s’y trouvait, organisèrent la résistance contre la domination étrangère. Après de longues guerres, les Hycsos furent vaincus et rejetés dans le désert. Cet événement, le plus important de ceux dont on a gardé le souvenir pour ces temps reculés, peut se placer vers l’an 1700 avant notre ère. Les Egyptiens se plurent à en retracer sur leurs monuments les divers incidents.

Moeris et son lac; Memnon et sa statue; Osymandias et son tombeau

De l’expulsion des rois pasteurs date pour l’Egypte une prospérité qui dura plus de 1000 ans. Le plus célèbre des rois de cette époque fut Moeris ou Amenemhat III (Amenemhet III) (1841-1796 av. J.C.), qui creusa ou agrandit le lac qui porte son nom, immense réservoir destiné à recevoir les eaux du Nil, et à y suppléer quand l’inondation était trop faible. Quelques générations après Moeris, régna Aménophis III (Amenhotep III) (1391/1390-1353/1352 av. J.C.), le Memnon des Grecs, le roi à la statue parlante1.

A cette époque appartient aussi le roi Osymandias (Ramsès II) (1279-1215 av. J.C.) dont l’antiquité célébrait les fabuleux exploits et le merveilleux tombeau. On disait qu’il avait porté ses armes jusque dans la Bactriane, et qu’au retour il avait bâti un immense édifice dont les peintures retraçaient ses hauts faits, une bibliothèque sur la porte de laquelle étaient gravés ces mots : « Remèdes de l’âme »; enfin un tombeau qui était surmonté d’un cercle d’or de 365 coudées.

Ces merveilles sont très problématiques, mais ce qui ne l’est pas, c’est que les princes guerriers de la XVIIIième dynastie (vers 1570 av. J.C.), dont plusieurs portèrent le nom de Ramsès, étendirent au loin la puissance de l’Egypte.

1. L’antiquité croyait que la statue qui représentait ce pharaon rendait des sons quand elle était touchée par les premiers rayons du soleil levant. Elle était, en effet, formée d’une pierre sur laquelle la chaleur d’un soleil africain, succédant à des nuits relativement froides et humides, produisait, par l’éclat soudain de quelques grains ou plaques de la surrace, des crépitations qu’on prenait pour la voix de la statue même.

Sésostris (XVIIième dynastie) (vers 1570 ou 1878-1841 av. J.C.?)

Le plus fameux de ces princes et de tous les rois égyptiens fut Sésostris ou Ramsès le Grand ou Senusret III. Suivant un ancien écrivain, Sésostris avait été préparé par son éducation au rôle de conquérant. Entouré dès sa naissance, par son père, des enfants nés le même jour que lui, il avait fait avec eux l’apprentissage de la guerre par de rudes exercices, de longues courses et des luttes continuelles contre les animaux du désert ou contre ses sauvages habitants.

Ses conquêtes en Afrique, en Asie et jusque dans la Thrace (XVIIième dynastie) (vers 1782 ou 1570 av. J.C.?)

A la mort de son père, Sésostris rêva d’autres exploits. Il choisit 600000 fantassins parmi les hommes les plus braves et les plus robustes de toute l’Egypte, réunit 24000 cavaliers et 26000 chars de guerre. A la tête de cette armée formidable furent placés les compagnons de son enfance, dont il avait pu apprécier le courage et l’habileté. Il soumit d’abord l’Ethiopie, lui imposa un tribut en ébène, en or et en dents d’éléphants, et tandis qu’une flotte de 400 vaisseaux longs, équipés sur le golfe Arabique, subjuguait les rivages et les îles de la mer Rouge et de l’océan Indien, il dompta l’Asie occidentale et s’avança jusqu’au Gange. Remontant alors vers le Nord, il soumit les tribus scythiques jusqu’au Tanaïs, laissa une colonie dans l’isthme qui sépare la mer Noire de la mer Caspienne, et pénétra par l’Asie Mineure dans la Thrace, où la disette, la rigueur du climat et la difficulté des lieux mirent un terme à ses triomphes.

Ses travaux : l’obélisque de Louqsor (XVIIième dynastie) (vers 1782 ou 1570 av. J.C.?)

Au bout de neuf ans, Sésostris revint dans ses Etats, traînant d’immenses dépouilles et une foule de captifs qu’il fit travailler à l’assainissement et à l’embellissement de l’Egypte. Il bâtit des villes, éleva des chaussées pour que les habitants pussent communiquer entre eux pendant l’inondation. Il divisa le pays en 36 districts appelés nomes, à chacun desquels il préposa un nomarque chargé du recouvrement des impôts et des autres fonctions administratives.

Les monuments qu’il construisit sont en grand nombre. Il éleva ou acheva le Ramesséum à Thèbes, les magnifiques constructions qu’on voit encore à Karnak, le temple, les colosses, les obélisques de Louqsor, dont l’un s’élève aujourd’hui sur la place de la Concorde, à Paris. C’est sous ce prince que quelques écrivains placent, en 1625 av. J.C., la sortie d’Egypte des Israélites.